Oui à la Constitution Européenne

Le "Non" avance dans les sondages. La plupart des gens autour de moi disent voter Non pour des raisons qui tiennent au rejet d’une Europe libérale ! Mais on mélange tout...

Il faut voter oui, non pas à cause des politiques européennes, bonnes ou mauvaise, mais pour une raison essentielle, fondamentale : l’Europe ne doit pas se réduire à un ramassis de fonctionnaires internationaux à Bruxelles et à des députés impuissants à Strasbourg.

Le texte de la Constitution européenne n’est pas un texte idéal mais le résultat de la négociation entre les représentants des Etats, nos représentants. Rien ne dit que si nous le rejetions aujourd’hui, demain —mais tard, très tard— la négociation donnera un texte meilleur. Il y a même des chances qu’une nouvelle négociation ne produise qu’un texte plus mauvais. Notamment parce que les constitutionnels français, et en particulier de Gauche, ont réussi à faire admettre la notion de services publics, de droits sociaux —dont les anglais ne voulaient pas—, d’absence de référence à Dieu et au christianisme —comme le voulaient les Polonais et les Espagnols—). Et de plus sans ce texte, on en reste à la situation actuelle qui est le Traité de Nice, un texte mou, qui produit une Europe sans charpente.

Ce texte est une constitution : il fait donc références aux institutions européennes (Le Parlement, le Conseil Européen, le Conseil des Ministres, la Commission, etc.). C’est-à-dire aux mécanismes de choix et de vote et aux relations entre ces institutions.

Il introduit la majorité qualifiée [1] pour les décisions du Conseil des Ministres. Pas l’unanimité requise actuellement qui enliserait les décisions européennes futures —surtout dans une Europe à 25 puis 27, puis plus encore.

Il crée la fonction de Ministre des Affaires Etrangères. Ceci est essentiel ; actuellement les traités par exemple d’association avec les pays son traités entre Bruxelles et Strasbourg de manière bureaucratique. L’Europe n’a aucune visibilité politique internationale ; elle se résume pour nos partenaires non européens (les pays du Sud de la méditerranée, les pays en développement, mais aussi les USA, la Chine, le Japon) à des fonds de financement de projets. Personne n’est là pour défendre une position européenne dans une arène internationale. A l’étranger, politiquement l’Europe c’est le ministre français, anglais, allemand, que sais-je. Evidemment ça ne résout pas les questions politiques ; mais ça permet de donner une véritable stature internationale à l’Union.

Elle donne un pouvoir accru au Parlement Européen, donc aux élus. Dans la situation actuelle ce sont les fonctionnaires de Bruxelles qui priment dans les décisions. (cela s’appelle la co-décision c’est-à-dire l’association du Conseil et du Parlement dans le travail législatif). Le Président du Conseil sera élu pour deux ans et demi, plutôt que la tournante semestrielle des présidences européennes actuelle. Stabilité minimale, mais pas intangible.

Le fonctionnement du Conseil Européen est renforcé, en fait créé avec cette Constitution. Cela ne peut que bénéficier à tous. On parle ici d’institutions pas de politiques spécifiques.

J’en profite pour mentionner que la France aura plus de sièges au Parlement Européen. De plus cela renforce le pouvoir du Parlement puisque actuellement il n’est associé qu’à 75% des décisions (le reste relevant encore une fois des pouvoirs démesurés de la Commission Européenne, c’est-à-dire des fonctionnaires internationaux de l’Europe à Bruxelles). Avec la Constitution il sera associé à 95% des décisions.

Ceux qui votent Non, utilisent des arguments qui ne relèvent pas de la constitution mais des politiques européennes. Et ces politiques sont le résultat d’un travail politique qui s’engouffre dans le vide institutionnel.

Encore une fois, je vote OUI pour que l’Europe ne soit pas réduite à la Commission Européenne, à une masse de fonctionnaires bien lotis et des mécanismes purement budgétaires.

Il y a plein d’autres raisons pour voter oui, mais celles-ci me paraissent essentielles.

J’en profite pour mentionner les remarquables articles de Jean Quatremer dans Libération.

[1La majorité qualifiée est désormais atteinte quand une décision rassemble 55% des Etats membres, comprenant au moins quinze d’entre eux, et représentant au moins 65% de la population de l’Union. Le poids de la France dans ce nouveau mécanisme augmente de 50%.

Posté le 14 avril 2005