Nouvel ordre mondial

Le sommet du G8 à Edimbourg apparaît comme un nouvel non-évenement. Est-là le résultat des changements en profondeur entre l’avant et l’après Iraq ?

On se souvient de la force des images de Seattle. L’alter-mondialisme est apparu sur le devant de la scène. Depuis il s’est passé beaucoup de choses qui ont modifié en profondeur la donne. La "guerre contre terrorisme", la guerre en Iraq, les négociations des droits de propriétés intellectuels en cours (débat très loin d’être terminé), et bien d’autres. Bref, un nouvel ordre mondial s’est dessiné où trois protagonistes apparaissent : la Chine, succès économique, omniprésente et politiquement incorrecte qui oblige les grands de ce monde à s’agenouiller ; les Etats-Unis, nouvel Empire qui menace les libertés sur son propre sol -comme tout empire ; l’Europe qui n’en finit pas de tomber de crise politique en crise politique, alors même qu’elle représente la seule alternative économique crédible.

L’échec du "Oui" a été une aubaine pour les américains qui voient dun mauvais oeil la consolidation d’une puissance politique nouvelle. Face au morcellement imposé et voulu par les puissants de ce monde, mais aussi par les alter-mondalistes, survivent aussi les petites bandes organisées, les warlords en Afrique ou en Asie qui se nourissent de la pauvreté, l’ignorance et le caos politique. Les idéologues de l’anti-libéralisme se font de plus en plus nombreux.

Autrefois, dans mon enfance, il y avait a croyance dans le savoir, source non seulement de connaissance mais aussi de cohésion sociale. Cette foi semble mise à mal en Europe où le savoir ne semble plus assurer le lien social aussi efficacement. Il en va de même aux Etats-Unis où la foi militaire remplace la foi dans les institutions. En Chine, en dehors du succès économique cette foi inébranlable dans la force du savoir, qu’il soit dispensé par un maître ou par un aïeul, forme le terreau de l’espoir des petites gens des campagnes parties à l’assaut des villes pour y trouver un futur. Ces petites entreprises et cette foi dans l’avenir et le savoir forment le terreau du développement économique chinois.

Le rapport dur le développement humain dans les pays Arabes, qui a été une sorte de pavé dans la mare, mentionne justement la difficulté de l’accès au savoir dans les sociétés du monde "arabo-musulman". Ce qui saute aux yeux en visitant ces pays, c’est surtout l’exraordinaire diversité des pratiques de ce monde "arabo-musulman" qui me semble être la dernière fiction à la mode. En effet, quoi de commun entre l’Egypte et la Syrie, le Liban et la Tunisie, la Jordanie et l’Algérie, les pays du Golfe et tous ces autres pays que je viens de mentionner ? Vous oubliez la religion, me dira-t-on. Mais précisemment, la religion ne fait pas union. Il n’y a qu’à voir la conversion des frères musulmans en Egypte aux joies du management pour s’en convaincre. Ce qui fait union, c’est plutôt les coups de buttoir de l’Empire américain qui cimente de manière très certaine des pays qui ne se sentent en rien communs. Evidemment, ils partagent aussi des traits communs en dehors de la religion : un tribalisme excessif, une entrée dans la modernité fondée avant tout sur les petro-dollars, des gouvernements autoritaires, une certaine passivité de la population face à l’inertie des institutions. Aucun de ces traits n’est l’apanage exclusif des pays arabes, ni des pays musulmans.

Si le nouvel ordre mondial s’impose comme celui de grands blocs géopolitiques —en cela rien de bien nouveau— dans les pays éparpillés, ceux de la périphérie, il y a fort à parier que des mouvement de rassemblement auront lieu. Et rien ne dit que cela se fera pour assurer l’harmonie et la bonne entente des peuples.

Si le G8 a une responsabilité, c’est celle de faire en sorte que l’espoir renaisse, l’espoir dans le savoir, l’espoir dans la création, l’espoir que pourrait partager le petit épicier du coin et l’élève d’une université, celui d’améliorer son quotidien, de profiter des bons moments de la vie, bref de s’en "sortir".

Et bonnes vacances à tous !

Posté le 5 juillet 2005