Greenwashing coûteux à Astypalaia

Je reproduis ici le courrier d’un étranger qui connaît bien Astypalaia sur l’opération de poudre aux yeux que la Mairie de cet îlot pittoresque au milieu de la mer Égée mène avec l’aide du gouvernement et de Volkswagen — qui se foutent du monde !
... par contre les autorités ont réussi leur coup en faisant publier leur propagande sur France Inter et France Culture !

Je partage entièrement les opinions de ce passionné de l’île.

Et ici on trouvera quelques unes de mes photos sur l’île

Réponse à https://www.franceculture.fr/emissions/le-reportage-de-la-redaction/astypalea-lile-grecque-laboratoire-vert-de-leurope

Visiteur passionné de l’île d’Astipalea depuis 35 ans, et auditeur assidu et confiant de France Culture, je suis sidéré par l’article de M.P. Verot, qui de toute évidence n’a jamais mis les pieds dans cette île et n’a pas fait la plus élémentaire des investigations personnelles pour se documenter afin d’apporter un eclairage journalistique digne de France Culture sur cette affaire.

L’article régurgite dans une mise en forme à peine modifiée tout ce que les services de communication du ministère de l’environnement grec, de Volkswagen et de l’ambitieux maire d’Astypalea ont déversé dans la presse européenne.

Chère Madame Verot, cette île ne sera pas le premier laboratoire du monde à tenter l’autonomie énergétique. Une toute petite recherche vous aurait renvoyé au projet de El Hierro aux Canaries qui a fait mûrir son projet pendant des dizaines d’années pour atteindre avec une technologie originale cette autonomie énergétique. Ce projet-là a été étudié longuement par des ingénieurs inventifs, des économistes, des scientifiques de nombreuses disciplines, un homme politique réellement visionnaire qui a mené un combat très long pour être à l’abris des pressions de lobbies industriels ou de manipulations politiques... le but a été atteint en 2014, et El Hierro est devenue une référence dans la pensée écologiste et une leçon pour les recherches de solutions énergétiques locales dans le monde.

Rien de tout cela à Astypalea ! Ici c’est la conjugaison d’intérêts à courte vue.

Le ministère de l’environnement du gouvernement grec actuel n’a que faire de l’environnement et ne se sert d’Astypalea que comme un support de propagande vide d’idées et de volontés d’agir avec raison sur l’écologie. L’incompétence du ministre en la matière est consternante comme le montre son discours de présentation du projet lors d’une conférence de presse surréaliste. Ses promesses de subventions sont calquées sur celles d’autres pays alors qu’ici les moyens pour les tenirs n’existent pas et ne sont pas financées au niveau de l’état.

Comme vous le suggérez Volkswagen est largement suspectée de se servir de ce projet pour se verdir et faire sa publicité à peu de frais. Son projet n’est qu’esbroufe commerciale. C’est un "non projet" ficelé à la va-vite, sans études financières sérieuses étayées par des équations vérifiables et non des chiffres de propagande creuse. Il n’y a ni étude d’ingénierie sérieuse, ni proposition technologique adaptée à l’île qui devrait être assise sur un bilan scientifique interdisciplinaire...

Le maire est un ambitieux malin, car avec cette toute cette agitation médiatique irresponsable, qui fait parler d’Astypalea et de lui-même, il aura économisé les coûts d’une agence de publicité habile en désinformation. Si le Ministre et les responsables de Volkswagen ignorent l’essentiel de cette île, lui est coupable de faire semblant de ne rien voir de l’idiotie, de l’absurdité et de l’énormité de cette farce !

Rien de tous les équipements publics (récents et cofinancés par les aides européennes) qui existent ici et qui sont administrés par la Marie n’est maintenu correctement :

  • le réseau et le système d’épuration des eaux usées sont dans un état catastrophique et les eaux de certaines plages sont suspectes depuis de nombreuses années
  • la voirie (quelques km d’asphalte et quelques dizaines de km de chemins caillouteux) est catastrophique, et évidemment inadaptée aux véhicules électriques de la gamme Volkswagen présentée sur le port et la place du village
  • l’aire d’enfouissement officielle et les dépotoirs sauvages présentent la triste image de l’incurie de la mairie à traiter de ce très grave problème qui pollue le paysage de milliers de sacs plastiques envolés, qui sature les plages et rivages de toutes sortes de débris et sans doute de matières toxiques invisibles ou non
  • le système de production municipal de l’eau qui est censée être potable ne fournit en vérité qu’une eau impropre à la consommation. Lorsque sa consommation atteint son paroxisme en Aout, la retenue du barrage d’eau douce (alimenté par les pluies d’hiver) est vide, et l’eau du réseau est trouble, voire colorée et chargée de particules. Les fuites des égouts partout percés ne laissent aucune confiance en la qualité de cette eau "douce" qui circule dans les sols imbibés d’eaux usées et partout défoncés

...

La petite dizaine de bornes de charge des futurs véhicules électriques (financées par la municipalité) connaitra certainement le même sort que les bornes d’eau douce et de courant électrique qui ont été installées sur le port il y a quelques années : aucune ne fonctionne plus, aucune n’a jamais été réparée ,tout comme les installations sanitaires qui sont desormais abandonnées et sont un sinistre cloaque puant qui accueille merveilleusement les plaisanciers en escale.

La réalité est que cette île est en face d’un véritable défi écologique que ce maire ne veut pas voir et donc ne veut pas traiter. L’urgence pour lui c’est la fameuse "mobilité"... nous parlons d’une mobilité des touristes dans une île qui n’a pas plus à offrir qu’une trentaine de kilomètres de voies à peu près carrossables...

La nature est ici extrêmement sensible et fragilisée par une très ancienne exploitation du bois pour la chaux, par un élevage de chèvres et de moutons plus récent qui a épuisé la rare végétation et pollué d’excréments les rivages et leurs eaux, par un tourisme débridé complètement hors des capacités de l’île ...

Penser à panser toutes ces blessures, penser à un autre tourisme pouvant faire vivre les habitants et laisser une chance à la nature ne font pas partie du programme des trois entités qui se présentent comme des partenaires.

Ces questions ne valent-elles pas une enquête journalistique qui mérite son titre ?

La gravité du sujet ne vaut-elle pas la peine de décortiquer la désinformation manifeste ?

Zan Lovis, Astypalea le 9 juillet 2021


Le village (la Chora) depuis la plage de Aghios Konstantinos le matin et dans l’après-midi.

Posté le 14 juillet 2021